NBT : quels intérêts pour les consommateurs ?

  • Christian V.

Meilleure résistance au stress hydrique, aux maladies, au vieillissement, meilleurs rendements… Si les nouvelles techniques de sélection permettent d’améliorer des variétés, ces bénéfices sont généralement vus sous le prisme des agriculteurs, occultant leur intérêt pour les consommateurs. Pourtant, les NBT ont aussi pour objectif d’améliorer la qualité des aliments, que ce soit en termes de goût ou d’apport nutritionnel. Le cas de la tomate et du gluten en sont deux exemples pertinents.

NBT : quels intérêts pour les consommateurs ?

 

Des tomates plus goûtues et plus riches en nutriments

 

Dans un récent article, la prestigieuse revue Nature s’interroge : « le monde produit 800 milliards de tomates par an, mais combien valent la peine d’être consommées ? ». Interpellé par ce constat généralisé de perte de goût, Harry Klee, professeur d’horticulture à l’Université de Floride, s’est ainsi intéressé aux composés génétiques participant au goût de la tomate.

 

Pour ce faire, lui et son équipe ont séquencé le génome de 398 variétés de tomates, dont certaines sauvages, avant de soumettre une centaine de variétés à un panel de consommateurs. Il en ressort que 33 molécules chimiques sont associées au goût, 37 à l’intensité de la saveur, et 28 aux deux, et qu’un grand nombre de ces molécules ont été fortement réduites dans les variétés modernes.

 

Une partie de l’explication tient dans la volonté de produire à grande échelle et, pour cela, d’uniformiser la période de récolte. Ainsi les croisements réalisés afin d’obtenir des variétés mûrissant simultanément ont également eu pour effet de neutraliser les protéines GLK1 et GLK2, indirectement responsables de la production de sucre qui donne leur saveur aux tomates. Désormais décodé, le mécanisme conférant son goût à la tomate peut être restauré et rendre à ce légume sa saveur originelle.

 

De son côté, une équipe brésilienne de l'université de Viçosa envisage d’utiliser CRISPR ou les TALEN pour réactiver un gène responsable de la fabrication de capscaïcine, un composé chimique de la famille des alcaloïdes, composant actif du piment. Il serait ainsi possible d’obtenir des tomates légèrement pimentées.

 

Outre la restauration du goût, des chercheurs travaillent également pour améliorer les propriétés nutritionnelles de la tomate. Dans une étude publiée en avril 2018, une équipe chinoise explique ainsi comment elle a réussi, grâce à CRISPR-Cas9, à stimuler la synthèse de lycopène, dont les propriétés sont antioxydantes, tout en inhibant la conversion de lycopène en bêta et alpha-carotène. Grâce à cette double action, la teneur en lycopène de la tomate s’est révélée 5 fois supérieure à celle des tomates sauvages.

 

Un gluten adapté aux personnes atteintes de la maladie cœliaque

 

Les nouvelles techniques de sélection peuvent aussi permettre de développer des variétés adaptées aux personnes souffrant d’une intolérance alimentaire. La maladie cœliaque est souvent assimilée à une intolérance au gluten, ce qui n’est qu’en partie vrai. En fait, ce sont les gliadines, des protéines présentes dans le gluten, qui sont responsables de réactions nocives (inflammation de la paroi intestinale avec toutes les complications que cela entraîne).

 

Alors, pour permettre aux personnes intolérantes au gluten actuel (1% de malades cœliaque + 6% déclarés intolérants), une équipe de la Wageningen University, au Pays-Bas, travaille depuis plusieurs années à éliminer la gliadine du gluten. Ce travail est au cœur de la thèse d’Aurélie Jouanin, « Gene editing towards hypoimmunogenic gluten proteins in hexaploid bread wheat », achevée en 2019.

 

Une opération qui n’est toutefois pas simple en raison de la complexité du génome du blé, comme l’explique Jan Schaart, l’un des chercheurs néerlandais : « il y a six copies de chaque chromosome. Si l’on veut changer le gène, il faut donc changer les six copies. Et, pour rendre la chose encore plus complexe, chaque chromosome possède plusieurs copies du gène, jusqu’à 50 ! ». Il précise qu’une commercialisation de ce nouveau blé ne se fera pas avant cinq à dix ans.

 

Les new breeding techniques ne sont donc pas seulement intéressantes pour ceux qui font pousser les plantes, elles le sont aussi pour ceux qui les mangent. En restaurant des saveurs qui se sont perdues au fur et à mesure des sélections ou bien en générant de nouveaux traits qui ont un intérêt sanitaire, les NBT contribuent à enrichir la qualité de notre nourriture. En l’état, les débats sur ces techniques restent très centrés sur leur valeur technologique et oublient souvent d’aborder qu’in fine, ce sont les consommateurs aussi qui bénéficient des avancées de la recherche.

 

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